QUEBECITUDE

QUEBECITUDE

TC_UNE BELLE HISTOIRE

Vendredi 13 janvier 2006.

 

VOICI UNE PETIE FANTAISIE QUI NOUS RAPPELLERA NOTRE RIGUEUR DE L’HIVER ET NOTRE DÉSIR DE LA VOIR DISPARAÎTRE AU PLUS SACRANT.

 

J’ai trouvé cette « perle » de texte sur un site « paranormal »  heu! Oui!

(alt.fr.paranormal.medium)

 

UNE JOLIE HISTOIRE

Texte: Enric Larreula
ED. Casterman, coll. Le croque-livres, 1985.


Au temps où les animaux parlaient, il y eut une année où l'hiver dura si longtemps que l'on crut bien qu'il ne finirait jamais.  Plusieurs mois s'étaient déjà écoulés et pourtant un froid mordant  s'entêtait, jour après jour, semaine après semaine, à tourmenter bêtes et plantes de ses neiges gelées.

Les nuit étaient longues, interminables et glacées.  Chaque matin, quand la lumière ténue du jour éclairait l'horizon, une nouvelle et épaisse couche de givre recouvrait les arbres, le sol et même le corps de malheureux animaux qui ne pouvaient trouver refuge dans une quelconque tanière.  Personne dans la foret n'avait le souvenir d'un hiver aussi long et aussi rigoureux.  On aurait dit que le beau temps ne parvenait pas à revenir. Et c'est en vain que les animaux guettaient l'aube dans l'espoir d’une lumière plus matinale.

Les animaux se protégeaient du froid chacun à leur manière. L'ours telle une grosse boule ensommeillée, se blottissait au fond de sa grotte. Le hérisson tapi dans son nid faisait de même. Le loir, ce vagabond, logeait dans un nid abandonné !  Quant à la salamandre, elle avait élu domicile dans un trou d'arbre vermoulu.

Le crapaud, quant à lui, s’était tout simplement enterré. L'écureuil et la souris ne dormaient pas. Retirés dans leur gîte, ils attendaient que passe l'hiver, grignotant des glands, des pignons et toutes sortes de graines qu'ils avaient emmagasinées dans leur garde-manger bien avant que ne surviennent les premiers frimas.  Mais les animaux qui souffraient le plus de cet hiver prolongé étaient ceux qui devaient le passer au grand air: le cerf, le daim, le chevreuil, le sanglier et ce pauvre chamois descendu des montagnes pour chercher refuge dans la vallée plus clémente ne trouvaient dans celle-ci que gel, glace et froidure !  Et les lièvres et les lapins devaient quitter régulièrement leurs gîtes et leurs terriers pour trouver de l'herbe, mais rien trouvaient pas le plus petit brin !

Les malheureux, affamés, étaient réduits à ronger le bois des branches mortes et l'écorce des souches endormies. Chaque jour, les animaux du bois scrutaient le ciel avec anxiété. Demain peut-être verraient-ils enfin cette lumière et cette chaleur dont ils avaient tant besoin ?  Mais au matin, le ciel était couvert de brumes froides et la neige recommençait à tomber sur le bois déjà blanc comme la lune.  Et chaque jour qui naissait apportait une nouvelle déception et l'espoir gelait, petit à petit, au fond des cœurs. Même le vieux chêne, l'ancêtre de la foret, perdait courage.  Lui qui avait déjà connu plus de mille hivers ne se souvenait pas d'en avoir vécu un aussi long, aussi froid, aussi blanc.

 

- Qu'est-il arrivé au printemps ?
- Pourquoi n'est-il pas encore là ?
- La course des astres serait-elle dérangée ?   L'hiver ne finira-t-il
jamais ?

Voilà les questions que se posaient avec inquiétude: Les plantes, les arbres, les animaux et même la rivière qui avait hâte de couler à nouveau et de faire chanter sa cascade, figée maintenant en une glace aussi dure que la pierre. Personne ne pouvait supporter cela plus longtemps.  Ce jour-là, tous les animaux devaient se réunir. Il fallait que quelqu’un aille chercher le printemps !

Cette réunion était si importante que l'on décréta une trêve entre animaux: Ce jour-là, il n'y aurait ni poursuite, ni coup de dent, ni coup de griffe, ni bagarre, ni menace.  Le danger commun exigeait que tous se comportent comme des compagnons réunis.  L'assemblée des animaux élirait celui qui serait le plus apte à retrouver le printemps.  Tous les animaux étaient présents à la réunion.  Les habitants de la plaine comme les montagnards, ceux qui vivaient dans les rochers comme les riverains des fleuves et des torrents.

L'ours et le hibou arrivèrent en baillant et en se frottant les yeux: Ils avaient dû interrompre leur sommeil !  La belette, la renarde et la genette, par contre, n'arrêtaient pas de gigoter et de se plaindre:

- mais quand va-t-on commencer ? Qui attendons-nous encore ? Disait l'une.
- Il y en a toujours qui traînent ! rouspétaient les deux autres.

Perchés sur les branches d'un arbre voisin, le rossignol, le pinson, le chardonneret et le verdier se serraient frileusement les uns contre les autres pour se donner un peu de chaleur.  La chouette, le grand-duc et le chat-huant s'étaient levés de bon matin pour être aux premières loges: ils occupaient une branche qui surplombait le lieu de réunion.  Le grimpereau, le loriot, la perdrix, le héron cendré, le rouge-gorge, le geai et la huppe faisaient de jolies taches de couleur qui se détachaient sur le paysage ouvert de neige.

Si la réunion n'avait pas été aussi sérieuse, on aurait pu croire à une fête !  La belette qui était la plus bavarde, prit la parole:

- il faut envoyer l'un de nous chercher le printemps, dit-elle, et le plus tôt sera le mieux.  Celui que nous choisirons devra être très rapide, léger et alerte.

A ces mots, l'ours, la marmotte, le hérisson et tous les dormeurs comprirent qu'ils ne risquaient pas d'être choisis.

 

- Donc les lents et les paresseux sont éliminés, conclut la belette.

 

Ce devra aussi être un animal de haute taille, dit alors un des
participants, car il faut qu'il puisse voir de loin !

Dès lors, la belette n'ajouta plus un mot. Elle était en effet trop courte sur pattes pour cette mission.  Car le voyage risquait de s'avérer long et difficile.  Le messager de la foret devait donc être fort.  Aussi les animaux les plus faibles, comme les oiseaux, furent-ils rayés de la liste.
Rapide, grand et fort.  En fait, le choix était facile.  De tous les  animaux, seul le cerf réunissait toutes ces qualités.  Léger comme le vent, il pouvait courir pendant des jours entiers.  De haute taille, il avait une vue perçante et pouvait voir à de très grandes distances.

Enfin, fort comme un cheval, il supportait de longues galopades et affrontait sans crainte les pires intempéries. Tous les regards se tournèrent vers lui.  Le cerf ne se fit pas prier.  Il accepta l'énorme responsabilité que ses compagnons lui confiaient: il irait chercher le printemps, coûte que coûte.  Guidé par son instinct, vif comme l'éclair, il trouverait le beau temps. Tôt le lendemain, le cerf se mit en route.

Les premières lueurs de l'aube commençaient à peine à teinter de gris la nuit noire que déjà il galopait avec acharnement.  Il traversa des bois et des montagnes, des vallées profondes et des lacs gelés, durant vers le sud, d'où chaque année venait la saison tant espérée.  Il découvrit des pays inconnus et rencontra bien de monde. Quel voyage!

De tous les animaux de sa foret, seuls les oiseaux migrateurs, qui, chaque année, fuyaient l'automne vers de lointains printemps, avaient pu voir autant de contrées différentes! Mais partout, c'était encore et toujours le froid et le gel qui l'accueillait. Et, malgré toute sa bonne volonté, le cerf savait que si son voyage se prolongeait trop, ses forces finiraient par l'abandonner. Arriverait-il un jour au but ?

 

Le septième jour, le cerf se trouva face à une immense chaîne de montagnes.  Elles étaient si hautes et si nombreuses qu'elles masquaient l'horizon et leurs pentes, comme leurs sommets, étaient couvertes de neige. La vue de cet obstacle insurmontable démoralisa le cerf.

Fatigué, affaibli comme il l'était, l'ascension de cette chaîne neigeuse lui semblait au-dessus de ses forces. Découragé, il contemplait les géants de pierre et de glace qui semblaient le narguer.  C'est alors qu'il vit qu'une lumière nette et claire fusait entre les cimes les plus éloignées.  Là, au loin, on devinait un ciel bleu et lumineux !   Oui, il avait trouvé le bon chemin !   Le beau temps se trouvait au-delà de ses montagnes.  Il devait faire ce dernier effort.  Et le cerf se mit à escalader les contreforts glacés.  Il grimpait et grimpait, toujours plus haut.  Enfin, après bien des périls, il atteignit le dernier col.  Devant lui s'étendait une vallée magnifique, inondée de soleil printanier.

 

Ému jusqu'aux larmes, le cerf se laissa caresser longuement par les rayons.  Peu à peu, leur chaleur bienfaisante lui rendit ses forces perdues.  Il pouvait, maintenant, redescendre. A mesure qu'il s’éloignait des hauteurs, le printemps se faisait plus triomphant et radieux.  Bientôt, le cerf atteignit un pré, semé de buis et de rhododendrons, dont il foula l'herbe fraîche avec délices.  Il traversa encore un boqueteau tout résonnant du chant des oiseaux, puis se retrouva au centre de la vallée.

 Il était enfin arrivé !  C'était vraiment la plus belle vallée que l'on puisse imaginer.  A perte de vue, des tapis de fleurs multicolores chatoyaient sous un soleil étincelant.  Le cerf, regardant fixement le soleil s'écria:

-Printemps, Printemps, enfin je t'ai trouvé !   Je t'ai cherché par monts et par vaux pour te dire que nous n'avons jamais connu un tel froid, une telle faim.  Fais en sorte que chez nous renaisse la vie !  Les arbres t'attendent pour bourgeonner, les prÈs pour refleurir et nous, les  animaux, te supplions de nous rendre l'espoir.  Dis-moi, quand pourrons-nous à nouveau sentir tes caresses ?

Et soudain, une voix profonde résonna partout dans la vallée:

 

- C'est vrai, j'ai beaucoup tardé.  Mais l'hiver a été dur partout et j'ai eu bien du travail à faire fondre la neige des montagnes !  Ne sois pas pressé, j'arriverai bientôt dans ta foret. Retourne et annonce ma venue, je ne tarderai plus.

Les paroles du printemps rassurèrent le cerf. Tout allait reprendre sa
place dans sa foret.

 -Cela durera-t-il encore longtemps Printemps ? demanda-t-il timidement.

- Quelques jours, peut-être quelques semaines... J'ai encore beaucoup de          travail.

- C'est que, vois-tu, Printemps, là-bas, chez moi, ils sont tous très impatients !  S'ils me voient revenir seul, peut-être ne me croiront-ils pas.

- Ne t'inquiète pas, personne ne doutera de tes paroles.  Sais-tu pourquoi ?  Parce que je ferai de toi le symbole du bois renaissant.  Et chaque année, tu annonceras ma venue par de nouveaux rameaux qui germeront sur ta propre tête !  Tous ainsi connaîtront la bonne nouvelle.

Et depuis ce jour, chaque année, quand s’annonce le printemps, tous les cerfs du monde voient fleurir leur tête et leurs bois orgueilleux sont comme une promesse de renouveau et de renaissance.

 



14/01/2006
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